Ils demandaient donc aux quatre FAI de mettre en œuvre « toutes mesures propres à empêcher l'accès, à partir du territoire français et/ou par leurs abonnés à raison d'un contrat souscrit sur ce territoire, par tout moyen efficace et notamment par le blocage des noms de domaines ».
Inexorablement, les technologies de DPI* et de Data-Mining nous amènent vers un traitement de l'information de plus en plus intrusif, des systèmes de profilage de plus en plus efficaces.
Or ces technologies devancent dans les faits l'encadrement législatif sensé protéger les droits des citoyens, qui se trouvent contraints de se servir des applications qui fonctionnent grâce à ces technologies d'une manière ou d'une autre.
On aurait pu espérer une réflexion à la hauteur des enjeux citoyens qui accompagnerait le développement et l'usage de ces technologies, et un volet législatif qui encadrerait - dans le respect des droits de chacun - les produits qui en résultent.
En France, nous avons pu constater à quel point les produits dévéloppés dans ce domaine et les acteurs et décideurs dans ce domaine stratégique ont cruellement manqué d'une telle réflexion et d'un tel encadrement législatif et juridique.
SFR tombe le masque
Après avoir joué avec le feu pendant des mois, la Société française du radiotéléphone vient finalement de se décider, en montrant de façon univoque que la neutralité du réseau, en fait ils n'en ont rien à br...er, en proposant un forfait d'accès à Internet par réseau cellulaire LTE, limité à 5 Gio par mois, sauf pour les données provenant de YouTube.
Problèmes
Le premier problème, évident, est la distorsion de concurrence : YouTube est ici artificiellement favorisé par rapport à ses concurrents. DailyMotion, si j'étais vous, je commencerais à faire plancher mes juristes.
Le second problème, c'est l'incohérence que ces conditions représentent. En effet, qu'est-ce qui justifie la limitation mensuelle de quantité de données, très courante sur les réseaux cellulaires ? En général, les opérateurs s'en justifient en évoquant la limitation naturelle du support physique de la connexion, l'air, dont la capacité de transport qui doit être partagé entre les utilisateurs de chaque cellule de communication. Eh bien là, SFR, vous venez de montrer que cet argument était totalement bidon, vu qu'il ne semble pas y avoir de problème de partage de capacité lorsque ça vient de YouTube.
Enfin, le dernier problème, et le plus important à mon avis, est qu'il s'agit d'une véritable boîte de Pandore. SFR pourrait ainsi décider de fixer une faible limite, ou un faible débit, pour les données provenant de Twitter, et demander à ces derniers de payer pour qu'ils lèvent ce bridage. Pire, ils pourraient s'entendre avec Viadeo pour affaiblir LinkedIn, en favorisant les données du premier et en exigeant du second un tribut prohibitif pour accéder aux mêmes privilèges. Et tant qu'à faire, ils pourraient aussi décider de ne pas du tout transporter les paquets provenant, disons, de blogs critiquant leurs pratiques
«De nombreux autres usages d’Internet sont empêchés (et ce n’est jamais signalé dans les publicités), et sont parfois même considérés comme anormaux par les opérateurs !»
Pas sans rappeller https://twitter.com/bouyguestelecom/status/201341777708462083
L'opérateur revendique le FTTH (fibre jusqu'à l'abonné) le plus rapide du marché et commence aujourd'hui des tests pour hisser son débit à 1 Gb/s. OK, mais pour quoi faire ?
Après que l'ARCEP a demandé des explications à SFR sur son proxy 3G, il se pourrait que d'autres opérateurs se permettent, au mépris de la Neutralité du Net, de modifier les pages web vues par leurs abonnés 3G à l'insu de tous, y compris des éditeurs des sites concernés : voici un exemple qui pose question chez Sosh, la filiale « low cost » de l'opérateur historique Orange
La situation cocasse dans laquelle SFR se met en éditant le code source des pages web des sites pour les servir à ses abonnés pourrait bien le mettre dans une situation assez… intéressante. L’impact pourrait dépasser d’assez loin le cadre de l’optimisation pour offrir une bonne « expérience utilisateurs ». Yoshi a attiré notre attention sur un point de droit concernant la définition des intermédiaires tel qu’énoncé par la LCEN (Loi pour la Confiance dans l’Economie Numérique). Et en effet, l’article L32-3-4 dispose :
« Art. L. 32-3-4. – Toute personne assurant dans le seul but de rendre plus efficace leur transmission ultérieure, une activité de stockage automatique, intermédiaire et temporaire des contenus qu’un prestataire transmet ne peut voir sa responsabilité civile ou pénale engagée à raison de ces contenus que dans l’un des cas suivants :
« 1° Elle a modifié ces contenus, ne s’est pas conformée à leurs conditions d’accès et aux règles usuelles concernant leur mise à jour ou a entravé l’utilisation licite et usuelle de la technologie utilisée pour obtenir des données ;
En modifiant les contenus avant de les servir, SFR pourrait donc voir sa responsabilité civile et pénale engagée ! Et vous allez voir, dans certains cas ça peut être drôle… très drôle. Vous serez par exemple surpris d’apprendre que SFR Vivendi Universal est maintenant co-éditeur de ThePirateBay le célèbre tracker Torrent
[...]
Moralité : quand un opérateur sort du cadre de sa mission en modifiant les pages qu’il sert, il prend quand mêmes quelques risques non négligeables… Si des juristes ont une opinion sur le sujet, le débat est ouvert. Le service juridique de l’opérateur a-til envisagé ce type de situation ?
Un autre petit détail, concernant cette fois ci le droit des marques. En France, Internet est une marque déposée à l’INPI par Valentin Lacambre, co-fondateur de GANDI et fondateur d’Altern.org. Que se passerait-il si ce dernier attaquait les opérateurs mobiles en contrefaçon ? (http://fr.wikipedia.org/wiki/Valentin_Lacambre)
A l'heure des choix. Le web est à un tournant de son histoire. C'est précisément parce qu'il nous concerne (presque) tous, c'est parce qu'il nous est devenu aussi nécessaire que peuvent l'être la possession d'une voiture ou l'accès à l'eau potable, que ces choix nous concernent tous. J'ai déjà eu l'occasion d'écrire (ici par exemple) que le web entrait dans l'âge de la maturité avec ce que cela comportait de réglementations, de normalisations, de législations calquées sur la territorialité de notre monde physique. J'ai souvent souligné, rappelant les principes fondateurs énoncés par Pierre Lévy, que les logiques de déterritorialisation et de re-territorialisation constituaient une clé précieuse pour la compréhension de l'écosystème internet.
Ça faisait bien longtemps qu’on ne nous avait pas sorti un Spanou® [...] notre problème ne s’arrête pas là : en plus du défaut total d’information, il y a une modification du code HTML et celle ci s’avère rapidement être une véritable altération de l’« expérience utilisateurs » mise en avant par SFR dans sa réponse officielle.[...] SFR, comme TOUS les opérateurs, devrait informer clairement les utilisateurs qu’ils n’accèdent pas à Internet, mais à un Internet dégradé. [...] Entraver la liberté des USAGES du réseau Internet, devrait constituer une atteinte à une liberté FONDAMENTALE. [...] En cassant la chaine de confiance « Internet » vous cassez bien plus que la gueule de quelques octets à la hâche dans une image… vous cassez la confiance sur Internet… toute entière.
Il est désormais avéré que l’opérateur modifie le code source des pages HTML présentées à ses abonnés mobiles : réduction des en-têtes, compression des images et des vidéos, réécriture à la volée d’éléments JavaScript…
"Etonné des proportions que cela prend", le directeur de l'information du groupe, Nicolas Chatin, explique que SFR "gère de façon dynamique le trafic sur le réseau, que ce soit fixe ou mobile. Nous utilisons des optimiseurs en 3G pour un affichage plus rapide." Le directeur de l'information confirme qu'à sa connaissance, "il n'existe pas d'option pour désactiver" cette optimisation. Mais surtout, pour lui, il n'y a pas de sujet au niveau de la neutralité du Net : "On refait le débat d'il y a cinq ans : si je regarde le contenu à l'intérieur, que je filtre ou que je ne distribue pas, c'est une atteinte à la neutralité. Mais nous ne filtrons pas et nous ne le ferons pas." En clair, tant que le Web est délivré tel quel à l'utilisateur, sans modifications au niveau des contenus, il n'y pas matière à attaquer l'opérateur.
« La pornographie est pensée comme un incubateur pour les outils de contrôle et ne représente que l’un des premiers maillons de la chaîne. »
[...]
L’idée envisagée par un Internet qu’on nomme volontiers à deux vitesses est une bombe à retardement, une mise à mort du concept fondamentalement démocratique qui soutient le réseau et, enfin, le règne annoncé des entreprises pouvant mettre la main à la poche pour favoriser leur contenu plutôt que celui de leurs concurrents. Contre la mise en place d’une telle idée se dressent aujourd’hui en France seulement deux entités : d’un côté, l’Etat qu’on n’a vu que peu compétent quand il a été question du numérique ; de l’autre, le Conseil National du Numérique. Cet organisme a d’ailleurs récemment proposé au gouvernement, dont il dépend, d’inscrire la neutralité d’Internet dans la loi.
Nous affirmions plus haut qu’il s’agissait ici d’une atteinte manifeste à la neutralité du Net. Dans sa définition, la Neutralité du Net implique que tout internaute, à n’importe quel point du réseau, accède aux mêmes contenus. Les contenus originaux, non modifiés par un intermédiaire dont le rôle est d’acheminer l’information. C’est encore plus grave quand une manipulation est opérée à l’insu des utilisateurs. Ici SFR nous sert des contenus qui ne sont plus les contenus originaux. Un utilisateur du réseau mobile SFR n’accède pas au même Internet que les autres. On peut même dire qu’il n’accède donc pas à Internet mais à un ersatz d’Internet. [...] L’ARCEP se saisira t-elle elle même du dossier ? Dans les faits, il y a bien peu de chances. Seul un opérateur peut la saisir, et il faut en outre que ce dernier s’estime lésé pour justifier sa démarche. En outre l’ARCEP est en ce moment en proie à une dissolution de ses pouvoirs. Il semblerait que Bercy, le « gestionnaire de la SARL Internet »‘, n’ait plus spécialement envie de donner les moyens techniques et juridiques à une autorité indépendante gardienne des bonnes pratiques des opérateurs. Bercy a toujours eu la fâcheuse tendance à plus reconnaitre le « marché Internet » et l’ économie numérique au détriment du bien commun universel qu’il constitue.
Un Conseil National du Numérique qui propose un ajustement juridique qui ne garanti en rien le respect de la neutralité du net, et des fuites qui confirment que le gouvernement s’apprête à l’enterrer, le tout accompagné de déclarations de bonnes intentions…
[...]
La réponse du gouvernement – ou son absence – devrait éclairer le débat sur les réelles intentions de la France en ce qui concerne la neutralité du net. D’une façon ou d’une autre, les masques devraient tomber dans les jours qui viennent. Souhaitons que les personnalités les plus intègres (il y en a) qui ont tenté de travailler avec le gouvernement pour sauver la neutralité du net se démarquent rapidement.
Accessoirement, les réactions de la CNIL et de l’ARCEP, tous deux mis au courant de l’affaire, seront également à regarder de près.
Hasard ou coïncidence, Arnaud Montebourg « tire à boulet rouge » sur l’ARCEP.
Pour diminuer le trafic sur son réseau, SFR s'est arrogé le droit de modifier les pages HTML et les images des sites web que visitent ses abonnés 3G. Effectuée à leur insu, cette manipulation est une violation caractérisée de la neutralité du Net.
Suite à notre article d’hier sur l’altération des pages web par SFR et suite à l’article de Pierre Col sur ZDNet expliquant la gravité d’un tel procédé et l’évidente atteinte à la Neutralité du Net que ceci implique, nous avons procédé à d’autres vérifications car nous soupçonnons SFR de ne pas appliquer ce genre de choses uniquement au protocole HTTP et à la visite de pages web.
Au détour de quelques surfs sur une connexion 3G SFR, votre serviteur a eu une fort désagréable surprise. En affichant le source HTML de plusieurs sites web, je suis tombé sur quelques bizarreries… Figurez vous que SFR injecte dans le code, fort probablement par le biais de proxys des choses qui n’ont pas à s’y trouver dans la définition que nous nous faisons d’un Internet propre et neutre qui se respecte.
Des contacts ont été pris entre les deux opérateurs, alors que Vivendi cherche à marier sa filiale SFR. L'opération qui créerait un groupe géant donnerait lieu à des synergies de 1,3 milliard d'euros selon Natixis.