Les nouvelles technologies vont toujours plus loin dans la collecte de données. De la médecine connectée aux lunettes omniscientes, pourra-t-on échapper au tout-numérique et protéger nos données personnelles ? Andrea Fies s'entretient avec Adrienne Charmet-Alix, porte-parole de La Quadrature du Net, association de défense des droits fondamentaux dans l'espace numérique.
Troisième épisode d’une semaine consacrée à l’engagement.
Aujourd’hui, nous parlons d’un éclatement des formes de l’engagement politique sur la toile. Avec Adrienne Charmet-Alix, jeune militante. Après avoir été Présidente puis Directrice des programmes de Wikimédia France, elle devient coordinatrice des campagnes de La Quadrature du Net, où elle s’oppose activement au projet de loi relatif au renseignement.
Au téléphone : Laurent Chemla, informaticien, ingénieur du web. Précurseur, il est le premier informaticien français à avoir été inculpé puis relaxé pour piratage informatique depuis un Minitel, en 1986.
Invité(s) :
Adrienne Charmet, coordinatrice des campagnes de la Quadrature du Net
Podcast: http://rf.proxycast.org/1105239412733648897/13954-09.12.2015-ITEMA_20860277-1.mp3
A peine arrivée à La Quadrature, en avril 2014, elle est tout de suite plongée dans le bain : loi terrorisme, fin 2014, attentats de janvier 2015 et les critiques du gouvernement contre les réseaux sociaux, loi renseignement… Elle avait envie de changer d’air après Wikipedia, mais l’actualité la rattrape : par rapport à Wikimedia, le travail est « beaucoup plus politique, plus défensif, plus dur moralement, plus riche intellectuellement – avant de gueuler, on prend le temps de réfléchir ! ».
Rapports, analyses juridiques, discussions avec des députés… La Quadrature publie beaucoup, collabore au recours auprès du Conseil d’Etat déposé par l’association FDN sur un décret d’application de la loi de programmation militaire. S’engage contre un projet de loi renseignement qu’elle juge dangereux. « On nous connaît de nom [à l’Assemblée] : on est vus comme des “chieurs”, mais on est facilement reçus par les députés, au moins dans les phases préparatoires des projets de loi. » Un travail de lobbyiste ? « On discute avec tout le monde, mais on ne fait pas vraiment la même chose qu’un lobby, on ne cherche pas à avoir une influence occulte. Quand on rédige des propositions d’amendements, on les publie en ligne ! »
Au bout du compte, le projet de loi sur le renseignement a été voté à une large majorité à l’Assemblée comme au Sénat. Une défaite, reconnaît Adrienne Charmet-Alix, mais une « défaite honorable », car plus de parlementaires que prévu se sont opposés au texte. Rétrospectivement, aurait-il fallu procéder autrement, faire des contre-propositions ? « Ce n’est pas notre rôle, juge Adrienne Charmet-Alix. Et puis ce n’est pas possible d’élaborer un modèle alternatif lorsque le gouvernement refuse de donner accès aux données et aux retours d’expérience. » Un an après son arrivée à La Quadrature du Net, cette littéraire assumée parlerait presque comme une ingénieure.