Au delà des considérations techniques ou juridiques (et des emmerdements bien réels causés par ces fausses alertes), cette histoire soulève évidemment des questions d’éthique. Tout d’abord, exercer des pressions sur les petits acteurs qui fournissent des services en dehors des grandes « plateformes », c’est faire le jeu de la centralisation de ces dernières, qui ne sont pas forcément en odeur de sainteté au niveau des données personnelles ou de la surveillance. Il ne faudra pas non plus venir pleurnicher sur la « souveraineté » perdue. Mais surtout, les technologies respectueuses de la vie privée ne peuvent — par définition — avoir la protection sélective. Les plus efficaces d’entre elles sont conçues pour que les opérateurs et autres administrateurs n’aient jamais accès aux clés. Est-il acceptable que le fournisseur d’un service protecteur de la vie privée soit inquiété pour le simple fait de proposer un tel service ? Notre choix en tant que société est plutôt binaire. Nous pouvons encourager le développement de ces technologies. Dans ce cas, nous arrêtons la schizophrénie et nous intégrons qu’elles puissent être marginalement utilisées par des personnes peu scrupuleuses, aux enquêteurs de s’adapter. Ou alors, nous faisons le deuil de notre vie privée, nous nous privons d’un bien collectif et social essentiel, et nous acceptons de vivre dans une société de transparence asymétrique dans laquelle le secret et la sécurité sont l’apanage des puissants ou des criminels.
5117 shaares