Des grands principes au cas pratique, il a fallu convaincre son auditoire de l’importance de « répondre au terrorisme sans perdre la raison », sous-titre de son essai « Pour la liberté », qui rassemble trois plaidoiries qu'il a prononcées devant le Conseil constitutionnel en défense des libertés publiques. Trois montées à la barre, entre janvier et mai de cette année, pour dénoncer la non-conformité à la Constitution de dispositions législatives contenues dans l’Etat d’urgence. François Sureau va même plus loin dans son ouvrage : par certains aspects, nous serions selon lui dans « un univers prétotalitaire » [...] Il a fallu arriver jusqu'au Conseil Constitutionnel, pour que neuf juges viennent dire : « Il est inadmissible qu'on empêche les français de lire ce qu'il veulent et de s'informer sur ce qu'il veulent. » Me Sureau
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C’est ce matin que le gouvernement a présenté en conseil des ministres le texte destiné à inscrire indéfiniment l’état d’urgence dans le droit commun. L’avis du Conseil d’État a été dévoilé par Le Monde. Tour d'horizon des principales remarques. [...] Le Conseil d’État considère que le projet de loi du gouvernement Philippe répond à l’ensemble de ces remarques. Les écoutes sont « limitées » à la défense et à la promotion des intérêts fondamentaux de la nation (en fait, toutes les nombreuses finalités de la loi Renseignement). Elles sont interdites si elles touchent à des réseaux gérés par un opérateur de communication électronique (téléphone portable, Wi-Fi), appelant auquel cas les autres dispositions de la loi de 2015.
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Pour la première fois depuis le 14 novembre 2015, l’Elysée a reconnu la réalité : l’état d’urgence est inefficace dans la lutte contre le terrorisme. Cela rend d’autant plus inutile sa transfusion annoncée dans le droit commun de la police administrative. [...] Mardi 13 juin 2017, à l’issue de la rencontre à l’Elysée entre le président de la Cour européenne des droits de l’homme et le président de la République, les services de la présidence ont fait savoir que « le président de la République a rappelé que l’objectif pour la France est aujourd’hui de sortir de l’état d’urgence, qui ne permet pas de lutter de manière suffisamment efficace contre le terrorisme ».
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L'avocat de la Ligue des Droits de l'Homme est l'invité de Patrick Cohen pour parler des dispositions de l'état d'urgence qui seraient inscrites dans le droit commun. [...]
Patrice Spinosi :"L'état d'urgence a eu ses raisons d'être ; il fallait des moyens exceptionnels pour un danger immédiat. On aurait du revenir à l'état normal. Maintenant c'est difficile de revenir en arrière. Macron récupère cette situation et y met fin en transposant les mesures dans le droit commun. Là est le danger car l'état d'urgence devient l'état du droit et c'est extrêmement dangereux"
Patrice Spinosi rappelle qu'il y a eu 5 000 perquisitions durant l'état d'urgence et seulement 0,5% ont donné lieu à de poursuites. Ce sont des enquêtes de police qui ont permis de déjouer des attentats.
Rappel : Maître Spinosi plaide les QPC au Conseil Constitutionnel et travaille avec les éxégètes https://exegetes.eu.org/
Réécouter: https://media.radiofrance-podcast.net/podcast09/15273-12.06.2017-ITEMA_21355272-5.mp3
]]>Le projet de loi renforçant la lutte contre le terrorisme et la sécurité intérieure annoncé par le gouvernement vient d’être dévoilé par le Monde. Next INpact vous propose une analyse ligne par ligne et librement accessible de ce nouveau texte sécuritaire.
Le projet de loi (PJL) présenté en conseil des ministres le 21 juin est calibré pour « renforcer et stabiliser l’arsenal législatif de lutte contre le terrorisme » dixit le communiqué de l’Élysée, en sortie du Conseil de défense organisé hier. Ce texte a une mission simple : garantir une sortie douce de l’état d’urgence qui sera prolongé jusqu’au mois de novembre prochain. De fait, cette sortie ne sera que maquillage puisque le projet de loi vient puiser de nombreuses dispositions dans la loi de 1955 sur l’état d’urgence, non sans s’inspirer de dispositions du quinquennat Hollande qui n’avaient pas été adoptées au Parlement.
Le texte dans une main, Next INpact vous propose une analyse ligne par ligne des 13 pages du PDF révélé par le Monde aujourd’hui.
Lire Aussi :
L’état d’urgence, indéfiniment… http://doyoulaw.blogs.liberation.fr/2017/06/02/letat-durgence-indefiniment/
https://www.mediapart.fr/journal/france/070617/etat-durgence-le-gouvernement-veut-faire-de-l-exception-la-regle
http://www.liberation.fr/france/2017/06/08/ces-libertes-dans-le-viseur-de-l-avant-projet-de-loi_1575500
https://www.mediapart.fr/journal/france/080617/une-atteinte-la-separation-des-pouvoirs-inimaginable-dans-la-quasi-totalite-des-democraties
http://www.liberation.fr/debats/2017/06/08/l-etat-d-urgence-dans-le-droit-commun-nous-avocats-nous-opposons-a-une-telle-mesure_1575337
http://www.liberation.fr/france/2017/06/09/etat-d-urgence-une-inscription-dans-le-droit-commun-qui-annule-toute-contestation_1575516
https://www.franceculture.fr/emissions/la-vie-numerique/hommage-aux-defenseurs-de-nos-libertes-numeriques
http://www.union-syndicale-magistrats.org/web2/fr/vers-etat-policier-_news_1053
https://www.franceinter.fr/emissions/l-edito-politique/l-edito-politique-09-juin-2017
https://www.franceinter.fr/societe/integrer-l-etat-d-urgence-dans-le-droit-commun-pourrait-remettre-en-cause-l-adhesion-de-la-france-a-la-cedh
https://www.franceinter.fr/justice/l-etat-d-urgence-un-pretexte-pour-restreindre-le-droit-de-manifester
http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/les-decisions/acces-par-date/decisions-depuis-1959/2017/2017-635-qpc/decision-n-2017-635-qpc-du-9-juin-2017.149083.html
http://mobile.lemonde.fr/societe/article/2017/06/09/le-conseil-constitutionnel-censure-l-interdiction-de-manifester_5141179_3224.html
http://www.bondyblog.fr/201706011821/letat-durgence-notre-loi-des-suspects/#.WTBL-iOLQy4
https://www.nextinpact.com/news/104504-etat-durgence-permanent-deluge-critiques-effroi-selectif-ps.htm
https://www.nextinpact.com/news/104516-plusieurs-organisations-unies-contre-etat-durgence-permanent-voulu-par-emmanuel-macron.htm
http://www.syndicat-magistrature.org/Projet-de-loi-renforcant-la-lutte.html
http://www.syndicat-magistrature.org/IMG/pdf/observations_loi_antiterroriste_article_par_article_9_juin_2017.pdf
http://www.slate.fr/story/146988/new-york-times-macron-etat-urgence
https://lesjours.fr/obsessions/entreprise-terroriste/ep25-urgence-loi/
http://www.france24.com/fr/20170531-etat-urgence-france-amnesty-international-denonce-nombreux-abus-droits-manifestation
Ce régime d’exception, autorisant principalement assignations à résidence et perquisitions sans passer par un juge, serait à l'origine de plusieurs interdictions de manifester, en particulier au cours des manifestations contre la « loi Travail » au printemps 2016, par le biais d'un article permettant aux préfets d'interdire des individus de séjour sur un territoire. Plusieurs ONG dénoncent l'usage "massif et abusif" de cet article par l'Etat, non pas pour prévenir des attaques terroristes mais « pour servir des objectifs plus larges, notamment pour maintenir l’ordre public», déclare notamment Amnesty International. Alors que l'exécutif a signifié le 24 mai dernier, la possibilité d'une reconduction pour la sixième fois de l'état d'urgence qui doit se terminer en juillet, y a-t-il état d'urgence sur nos libertés ? C'est la question que nous posons à François Sureau, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation. Il a plaidé le 29 mai dernier à l'occasion d'une question prioritaire de constitutionnalité pour contester la conformité de l'article 5 de la loi relative à l'état d'urgence (retrouvez ici la vidéo de l'audience) http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/videos/2017/mai/affaire-n-2017-635-qpc.149030.html | PARTIE 2 : https://www.franceculture.fr/emissions/linvite-des-matins-2eme-partie/y-t-il-etat-durgence-sur-nos-libertes-2eme-partie
http://rf.proxycast.org/1307317410428100609/13983-06.06.2017-ITEMA_21348122-3.mp3
http://rf.proxycast.org/1307317395206971393/13983-06.06.2017-ITEMA_21348122-2.mp3
Face à un mur, il faut savoir faire autre chose que se taper la tête contre. Après des années de violence légale, de défaites et de recul des libertés fondamentales, face à une représentation politique dont la seule logique est sécuritaire, La Quadrature du Net refuse de perdre davantage de temps à tenter d'influencer rationnellement ceux qui ne veulent rien entendre et choisit de réorienter ses actions. [...]
Ce n'est pas la multiplication des consultations et autres embryons de processus participatifs qui redressera le cap, tant que les logiques politiques d'autrefois continueront de prévaloir. Depuis deux ans, la société civile n'aura à la fois jamais été autant consultée et aussi peu entendue sur les sujets numériques. La logique participative a été constamment instrumentalisée pour masquer la persistance de la mainmise de la machine administrative et des lobbies installés.
Jour après jour, nous voyons grandir en parallèle la volonté citoyenne de reprendre en main ses outils numériques. Pour mieux protéger sa vie privée, pour mieux garantir ses droits fondamentaux face aux attaques ou aux carences des États, la société tout entière est en demande et dès qu'un espace s'ouvre, elle l'investit. Nous avons développé un travail de fond depuis quelques années sur la liberté d'expression, le droit à l'information ou l'équilibre des infrastructures, qui a pour effet et objectif de faciliter la participation des individus et des organisations, au delà des débats politiques et parlementaires pipés.
L'urgence permanente de répondre aux propositions irresponsables ou irréfléchies du gouvernement, des partis et de leurs relais au Parlement entrave les réflexions de fond, l'élaboration des propositions et la capacité à se saisir des nouveaux enjeux sociaux du numérique [...]
Nous tâcherons de nourrir les débats autrement, sans nous épuiser sur des batailles quotidiennes dans des cénacles institutionnels sourds aux expertises et revendications de la société civile, avec l'espoir que ce travail de réflexion et d'ouverture pourra également nourrir les programmes politiques soucieux de poursuivre le même objectif. Nous n'irons pas démarcher les partis en vue des élections, mais nous avons espoir que certains viennent s'inspirer de ce travail.
Nous écrirons, nous publierons, nous formerons, nous partagerons. Nous aiderons nos concitoyens à construire une société numérique respectueuse des droits, que ce soit en les formant à la sécurité informatique, en créant des espaces de débat, en promouvant la logique du Logiciel Libre et des services décentralisés, en participant à la création de Communs, en cherchant à faire grandir et protéger la liberté d'expression, en nourrissant les débats sur le droit d'auteur et le partage de la culture et des connaissances, et bien d'autres sujets encore.
Nous redoublerons d'effort pour produire une réflexion citoyenne capable d'anticiper les grands enjeux juridiques et politiques d'Internet.
Est-ce un abandon ? Absolument pas. Plutôt un recentrage, une volonté d'efficacité, un refus de cautionner un jeu de moins en moins démocratique, et une nécessité d'agir là où nous avons encore les moyens d'avoir des résultats. [...]
Nous espérons que cette réorientation de notre action incitera encore davantage de personnes à s'engager à nos côtés et à travailler à la construction d'un monde numérique digne d'une société démocratique. Nous invitons les autres associations ou groupes avec qui nous travaillons déjà ou qui partagent nos objectifs et constats à nous soutenir et accompagner dans cette démarche de ré-enrichissement du débat, afin de mieux peser dans les combats politiques et législatifs de demain.
]]>L'état d'urgence est toujours en cours en France, il a été prolongé de 3 mois le 26 février dernier. Alors que le Sénat va examiner la constitutionnalisation de l'état d'urgence et de la déchéance de nationalité à partir du 16 mars prochain, La Quadrature du Net s'associe aux collectifs contre l'état d'urgence qui appellent à une mobilisation publique le 12 mars dans toute la France, et à Paris à proximité du Sénat.
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«Tous les spécialistes le disent: l'arsenal juridique existait au moment des attentats, c'est juste que l'État n'a pas les moyens de l'utiliser. Une loi de plus ne changera rien. En revanche, en l'état actuel du texte, la France peut basculer dans la dictature en une semaine. Ce n'est pas acceptable.»
— Permalien
Amnesty international dénonce les conséquences de l’état d’urgence en France. Dans son rapport annuel, L’ONG dresse le bilan de l’année 2015 dans le monde, mais veut, cette année, attirer l’attention sur la situation en France. Avec une montée des discours nationalistes et xénophobes, notamment liée à la crise des migrants, mais aussi des dérives sécuritaires
Bonus et en lien : http://fra.europa.eu/sites/default/files/fra_uploads/fra-2016-surveillance-intelligence-services_en.pdf
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Il faut revenir à froid sur l'article premier du projet de loi constitutionnelle de « protection de la Nation », qui ne parle pas que de déchéance de nationalité, mais d'abord et avant tout de l'état d'urgence. Le texte adopté est excessivement dangereux, puisqu'il prive le Conseil constitutionnel d'une grande part de son pouvoir de contrôle. [...]
Mais sur le fond de cet article 1er qui inscrit l’état d’urgence dans la Constitution, on a finalement lu et entendu peu de choses. Beaucoup moins, en tout cas, que sur la déchéance de nationalité. Or il est essentiel et incroyablement dangereux. Lisez-le. http://www.assemblee-nationale.fr/14/ta/ta0678.asp
Pour comprendre pourquoi l’article 1er est dangereux et est tout le contraire d’une « protection de la Nation », il faut d’abord rappeler que le rôle du Conseil constitutionnel est de vérifier que les lois adoptées par le Parlement sont conformes à la Constitution. Si l’on change la Constitution, on change les fondements du contrôle constitutionnel.
Jusqu’à présent, l’état d’urgence pouvait être décidé par la loi, dans le cadre habituel de la Constitution. S’il était saisi, le Conseil constitutionnel pouvait dire si les mesures proposées par le législateur étaient compatibles avec le texte fondamental de la Cinquième République, et faire obstacle aux lois qui seraient disproportionnées. Certes, Manuel Valls s’est opposé à ce que le Conseil constitutionnel soit saisi de la loi sur l’état d’urgence de novembre 2015 (qui a des incidences pour le numérique), parce qu’il craignait justement cette censure. Mais des députés ou sénateurs inquiets auraient pu passer outre et saisir les sages. C’est une protection démocratique essentielle.
Paralyser le Conseil constitutionnel
Or que fait l’article 1er de la loi constitutionnelle, dont le fond a été si peu commenté ? Il ajoute dans la Constitution un nouvel article 36-1 qui dit que « la loi fixe les mesures de police administrative que les autorités civiles peuvent prendre » lorsque le gouvernement décide qu’il y a état d’urgence.
La majorité parlementaire pourra donc décider de mettre à peu près ce qu’elle veut comme mesures exceptionnelles de police, et s’il est saisi par des députés ou sénateurs inquiets dans l’opposition, le Conseil constitutionnel devra se borner à constater que la Constitution confère au Parlement le pouvoir de décider de ce qu’il est possible de faire.
L’article 36-1 créé ayant la même valeur juridique que tous les autres articles de la Constitution, et la même valeur que la Déclaration des droits de l’homme, le Conseil ne pourra pas ou difficilement trouver argument de l’incompatibilité des lois d’état d’urgence avec d’autres normes constitutionnelles. D’autant que le principe juridique lex specialis derogat generali (la loi spéciale déroge à la loi générale) pourrait trouver à s’appliquer.
Même, le Conseil constitutionnel ne pourra pas aller rechercher de normes supérieures dans la Convention européenne des droits de l’homme ou d’autres traités internationaux relatifs aux droits fondamentaux, puisqu’il estime que son rôle est de contrôler la conformité des lois avec la constitution, mais pas avec les engagements internationaux de la France — c’est le rôle des tribunaux, lorsque ces engagements sont d’effet direct.
« Ce que nous mettons en place, ce sont des mécanismes de contrôle très stricts sur le plan politique, comme sur le plan juridictionnel », avait promis Manuel Valls devant les députés, lors de la discussion du projet de loi constitutionnelle. Mais l’on peine à voir où sont ces contrôles stricts de la « protection de la Nation », à partir du moment où la Constitution est amendée pour désarmer le Conseil constitutionnel.
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Patatras ! Le Conseil constitutionnel vient de déclarer inconstitutionnelle une disposition de la loi sur l’état d’urgence, celle qui permettait la copie des données informatiques des lieux perquisitionnés. Une mesure introduite après les attentats du Bataclan, mais incompatible avec la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen.
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En cas de saisie, réalisée en présence d’un officier de police judiciaire, un procès-verbal devra mentionner ces motifs tout en dressant l’inventaire des biens. Ce PV est remis au principal concerné. Et ensuite ? « Documents, systèmes informatiques et équipements terminaux » visés sont conservés « sous la responsabilité du chef du service ayant procédé à la perquisition et à la saisie ».
Les agents auront alors 15 jours pour fouiller et copier l’intimité numérique de la personne avant restitution des biens à leur propriétaire. Certes, avant terme, celui-ci pourra toujours saisir le juge administratif pour obtenir une restitution anticipée, mais remarquons une chose : dans tous les cas, l’avant-projet de loi ne dit rien du sort des données copiées par les services, ni de ce qu’il adviendra des retranscriptions. La loi de 1955, modifiée après les attentats, souffrait déjà d’un même reproche qui a occasionné le dépôt victorieux d’une question prioritaire de constitutionnalité à la demande de la Ligue des droits de l’homme, auscultée actuellement par le Conseil constitutionnel.
Si le texte du gouvernement ne dit rien du sort des éléments copiés, il est par contre plus bavard sur une hypothèse particulière : celle où les agents viendraient à constater une infraction quelconque (un MP3, un film téléchargé…). Dans un tel cas, plus de restitution puisque « les biens saisis peuvent être conservés suivant les règles applicables en matière de procédure pénale. »
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L’état d’urgence a-t-il vocation à devenir permanent, au risque de voir nos libertés individuelles se limiter sur le long terme ? Cette mesure d’exception est-elle vraiment efficace ou est-elle utilisée comme un outil politique pour maintenir le pays dans la peur ?
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Des magistrats judiciaires ont récemment considéré que le juge de l’état d’urgence, c’est-à-dire en clair le Conseil d’Etat, n’était pas « indépendant et impartial ». L’avis rendu par le Conseil d’Etat le 2 février 2016 sur la prorogation de l’état d’urgence jusqu’au 26 mai 2016 vient accréditer cette hypothèse d’une proximité avec le gouvernement, que cette instance conseille et contrôle.
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L’état d’urgence se terminera fin février, possiblement sans reconduction. Adieu donc les pouvoirs spéciaux reconnus aux autorités… Mais c’était sans compter un nouveau projet de loi sorti du chapeau fin décembre. Décrété après les attentats du 13 novembre, l’état d’urgence a armé les autorités de compétences extraordinaires renforcées grâce à une loi adoptée quelques jours plus tard. Assignation à résidence, perquisition administrative même sur les ordinateurs et dans le cloud, le tout sans intervention préalable d’un juge, visant toute personne dont le « comportement constitue une menace pour la sécurité et l'ordre publics ». Un tel point d’entrée, volontairement flou, a soigné le travail des autorités, tout comme le chiffre d’affaires des artisans spécialisés dans l’installation de portes d’entrée neuves. [...] Dans la besace, perquisitions de nuit dès l’enquête préliminaire en matière de terrorisme, avec possibilité de les décider de manière préventive afin d'anticiper un risque d’atteinte à la vie ou l’intégrité physique ; mise en place d’IMSI-catchers, fausses antennes relai permettant de glaner les données de connexion voire de faire de l’interception des correspondances, sur simple autorisation du procureur, dans le cadre de la criminalité ou la délinquance organisée ; sonorisation et/ou surveillance vidéo d’un lieu dès l’enquête de flagrance ou l’enquête préliminaire ; possibilité de retenir pendant quatre heures une personne pour vérifier sa situation, sans droit à l’avocat, dès lors qu’il existe des raisons sérieuses de croire à l’existence d’un lien avec le terrorisme ; fouille des bagages, des voitures, sans présomption d’infraction, pour celui ou celle qui se trouve à proximité d’un site sensible, etc. ( http://abonnes.lemonde.fr/attaques-a-paris/article/2016/01/05/les-pouvoirs-de-police-renforces-pour-se-passer-de-l-etat-d-urgence_4841815_4809495.html http://abonnes.lemonde.fr/police-justice/article/2016/01/05/antiterrorisme-le-gouvernement-veut-etendre-les-pouvoirs-de-la-police_4841803_1653578.html )
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Pour le philosophe italien Giorgio Agamben, l’état d’urgence n’est pas un bouclier qui protège la démocratie. Il a, au contraire, selon lui, toujours accompagné les dictatures.
On ne comprend pas l’enjeu véritable de la prolongation de l’état d’urgence [jusqu’à la fin février] en France, si on ne le situe pas dans le contexte d’une transformation radicale du modèle étatique qui nous est familier. Il faut avant tout démentir le propos des femmes et hommes politiques irresponsables, selon lesquels l’état d’urgence serait un bouclier pour la démocratie. [...]
Dépolitisation des citoyens
La même imprécision et les mêmes équivoques reviennent dans les déclarations des femmes et hommes politiques, selon lesquelles la France serait en guerre contre le terrorisme. Une guerre contre le terrorisme est une contradiction dans les termes, car l’état de guerre se définit précisément par la possibilité d’identifier de façon certaine l’ennemi qu’on doit combattre. Dans la perspective sécuritaire, l’ennemi doit – au contraire – rester dans le vague, pour que n’importe qui – à l’intérieur, mais aussi à l’extérieur – puisse être identifié en tant que tel.
Maintien d’un état de peur généralisé, dépolitisation des citoyens, renoncement à toute certitude du droit : voilà trois caractères de l’Etat de sécurité, qui ont de quoi troubler les esprits. Car cela signifie, d’une part, que l’Etat de sécurité dans lequel nous sommes en train de glisser fait le contraire de ce qu’il promet, puisque – si sécurité veut dire absence de souci (sine cura) – il entretient, en revanche, la peur et la terreur. L’Etat de sécurité est, d’autre part, un Etat policier, car, par l’éclipse du pouvoir judiciaire, il généralise la marge discrétionnaire de la police qui, dans un état d’urgence devenu normal, agit de plus en plus en souverain.
Par la dépolitisation progressive du citoyen, devenu en quelque sorte un terroriste en puissance, l’Etat de sécurité sort enfin du domaine connu de la politique, pour se diriger vers une zone incertaine, où le public et le privé se confondent, et dont on a du mal à définir les frontières.
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Rebond: https://blogs.mediapart.fr/rene-fiori/blog/241215/rebond-sur-larticle-de-giorgio-agamben-de-letat-de-droit-letat-de-securite-paru-dans-le-monde-du-jeu
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Le 11 décembre 2015, le Conseil d'Etat a rendu ses premières décisions relativement à des arrêtés portant assignation à résidence. Malgré la saisine du Conseil constitutionnel à laquelle il a procédé dans l'un de ces arrêts, la position de l'exécutif sort renforcée de ces décisions. [...] Il faut y prendre garde : nous sommes tous directement et individuellement concernés par le phénomène de Minority Report à la française dans lequel nous venons, et pour longtemps hélas, d’entrer.
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Mediapart suite
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Débat Médiapart sur l'Etat d'urgence et lois d'exceptions
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L’état d’urgence, c’est la violence pure de l’État qui entretient une relation ambiguë avec le Droit : relève-t-il encore de l’espace du Droit puisque celui-ci le prévoit ou est-il situé hors de cet espace puisqu’il en anéantit la logique ?
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Joël est militant.
Il fait partie des trois cent cinquante-quatre personnes assignées à résidence par la police au nom de l’état d’urgence.
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La prorogation de l’état d’urgence ne peut être la réponse aux attentats du 13 novembre, comme la LDH et de multiples organisations ont déjà pu l’exprimer par un appel unitaire du 25 novembre dernier. De multiples mesures prises sur son fondement, telles des assignations à résidence ou encore des perquisitions, ont déjà démontré les dérives inhérentes à ce régime d’exception.
La LDH, représentée par maître Spinosi, a donc décidé d’introduire un recours pour excès de pouvoir à l’encontre du décret du 14 novembre 2015 et de la circulaire du 25 novembre 2015 organisant l’application de cet état d’urgence. A cette occasion, la LDH proposera à la haute juridiction administrative de transmettre au Conseil constitutionnel trois questions prioritaires de constitutionnalité portant sur la conformité des règles régissant l’assignation à résidence, les perquisitions et les restrictions à la liberté de réunion au regard des graves atteintes portées aux libertés fondamentales constitutionnellement garanties.
Parallèlement, la LDH interviendra volontairement ce vendredi en soutien de sept recours contre des décisions d’assignation à résidence portés devant le Conseil d’Etat statuant en référé.
La LDH se réserve en outre la possibilité, en cas de renouvellement de l’état d’urgence, d’engager toute nouvelle action contentieuse à son encontre.
Paris, le 10 décembre 2015.
— Permalien
Après la loi de programmation militaire, la loi contre le terrorisme, la loi sur le renseignement, la loi sur la surveillance des communications électroniques internationales, la loi prorogeant et révisant l’état d’urgence, la France prépare un nouveau texte sécuritaire.
Le 24 novembre, lorsque la France a alerté le Conseil de l’Europe que sa loi sur l’état d’urgence devrait déroger aux droits et libertés protégés par la Convention européenne des droits de l’Homme, elle a soutenu que « la menace terroriste en France revêt un caractère durable, au vu des indications des services de renseignement et du contexte international. »
Cette réforme était donc prévisible d’autant qu’on voit mal François Hollande prendre le risque de claironner en février prochain que la menace est désormais passée. Si un attentat devait survenir peu après, les conséquences politiques seraient incalculables pour la majorité.
Une réforme constitutionnelle
De cette situation pour le moins épineuse, deux suites logiques étaient donc attendues, espérées ou craintes c’est selon : une nouvelle prorogation de l’état d’urgence et un nouvel arsenal législatif. La possible prolongation a été déjà annoncée par Bernard Cazeneuve puis Manuel Valls. À trois jours des élections régionales, le Monde a obtenu des informations sur les grandes lignes de la réforme attendue.
Elle passera d’abord par l’inscription en dur de l’état d’urgence dans la Constitution. Cette modification permettra de contrecarrer à l’avenir d’éventuelles questions prioritaires de constitutionnalité qui viendraient contester la loi de 1955 modifiée suite aux attentats du 13 novembre.
Selon nos confrères, l’état d’urgence pourrait aussi être programmé pour une durée de 6 mois, avec une sortie en douceur, si on peut dire, où la police disposerait de pouvoirs exceptionnels, histoire de faciliter la transition vers l’état normal. Selon des sources plus récentes, il n'y aurait aucun délai prévu par la Constitution, histoire de laisser du champ libre à l'exécutif.
A lire ailleurs:
Olivier Beaud : « Il ne faut pas constitutionnaliser l’état d’urgence »
http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/12/01/il-ne-faut-pas-constitutionnaliser-l-etat-d-urgence_4821030_3232.html
Après les attentats, deux nouvelles lois sécuritaires
http://rue89.nouvelobs.com/2015/12/03/apres-les-attentats-deux-nouvelles-lois-securitaires-262345
Etat d’urgence : les députés veulent prendre le contrôle
http://rue89.nouvelobs.com/2015/12/02/etat-durgence-les-deputes-prennent-controle-262336
Attentats: ce que prévoit la révision constitutionnelle voulue par l'exécutif:
http://www.publicsenat.fr/lcp/politique/attentats-prevoit-revision-constitutionnelle-voulue-lexecutif-1151763
Vanessa Codaccioni : «De moins en moins visible, la justice d’exception devient de plus en plus acceptable»
http://www.liberation.fr/debats/2015/12/01/vanessa-codaccioni-de-moins-en-moins-visible-la-justice-d-exception-devient-de-plus-en-plus-acceptab_1417540
Les symptômes d’un état fasciste:
En 2003, le docteur Lawrence Britt, analyse politique de son état a publié un livre dans lequel il a étudié plusieurs caractéristiques d’un régime fasciste. L’étude se base sur des régimes tels que celui d’Hitler, Mussolini ou Pinochet et 14 signes permettent d’identifier les dérives d’un régime vers un état fasciste.
http://reflexiums.blogspot.fr/2012/08/les-symptomes-dun-etat-fasciste.html
https://wiki.laquadrature.net/images/c/cc/Attentifs_ensemble.png
Comment l’obsession sécuritaire fait muter la démocratie:
L’article 20 de la loi de programmation militaire, promulguée le 19 décembre, autorise une surveillance généralisée des données numériques, au point que l’on parle de « Patriot Act à la française ». Erigé en priorité absolue, l’impératif de sécurité change souvent de prétexte (subversion politique, « terrorisme ») mais conserve sa visée : gouverner les populations. Pour comprendre son origine et tenter de le déjouer, il faut remonter au XVIIIe siècle…
http://www.monde-diplomatique.fr/2014/01/AGAMBEN/49997
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Concernant la dissolution de groupes et d'associations, la procédure permet une interprétation très large et donc une atteinte grave à la liberté d'association, en décrivant des associations qui « participent à la commission d'actes portant une atteinte grave à l'ordre public, ou dont les activités facilitent cette commission ou y incitent », ce qui permettrait d'y inclure nombre d'associations promouvant, par exemple, l'utilisation de technologies de chiffrement qui sont utilisées certes par des criminels, mais surtout principalement par de nombreux citoyens innocents. Cette crainte est renforcée par le fait que les pouvoirs extraordinaires conférés au pouvoir administratif par l'état d'urgence sont actuellement utilisés pour des affaires sans lien avec l'anti-terrorisme.
«Dans le discours politique actuel, le terme de sécurité est magnifié. On proclame que c’est la première des libertés. On entretient ainsi la confusion. Car ce qui est consacré dans la Déclaration des droits de l’homme, c’est la sûreté, c’est-à-dire l’assurance, pour le citoyen, que le pouvoir de l’Etat ne s’exercera pas sur lui de façon arbitraire et excessive. Le droit à la sûreté, c’est la garantie des libertés individuelles du citoyen.»
R.Badinter
L'exécutif s'est placé dans une surenchère irresponsable. Dans la panique, il ouvre la boite de Pandore. Si le Front national avait proposé de réviser la Constitution pour de tels motifs il y a encore 8 jours, il y aurait eu une levée de bouclier de la classe politique.
Quelles annonces vous choquent-elles le plus ?
Tout ce qui ne relève pas de l'urgence qu'il y a à traquer les terroristes prêts à opérer me choque. Que veut dire "dissoudre des associations qui facilitent ou incitent à la commission d'actes portant une atteinte grave à l'ordre public". Cela ne risque-t-il pas permettre de restreindre le droit de manifestation? L'on apprend aussi qu'un groupe de parlementaires socialistes veut réintroduire le contrôle des médias. Pourquoi pas rétablir aussi la censure générale comme sous les monarchies d'Ancien Régime?
http://www.reporterre.net/A-l-Assemblee-nationale-ces-derniers-jours-j-ai-eu-honte
Est-ce la fin de l’État de droit ?
S’il n’y a plus de séparation des pouvoirs, vous n’avez plus la justice pour contrôler l’exécutif, c’est effectivement un danger pour la démocratie.
http://www.terraeco.net/Adrienne-Charmet-Alix-Quadrature,62518.html
http://www.lesinrocks.com/2015/11/20/actualite/ignacio-ramonet-un-etat-de-droit-ne-peut-pas-vivre-pendant-des-mois-en-etat-durgence-11789053/
http://www.lexpress.fr/actualite/politique/l-etat-d-urgence-instaure-une-societe-de-surveillance-et-de-suspicion_1738018.html
https://www.slate.fr/story/110359/six-deputes-contre-loi-etat-urgence-arguments
http://www.wsws.org/fr/articles/2015/nov2015/cons-n20.shtml
http://www.liberation.fr/france/2015/11/19/une-liberte-attaquee-par-l-ennemi-et-restreinte-par-l-etat_1414769
http://www.lexpress.fr/actualite/societe/reformer-la-constitution-sous-un-pretexte-securitaire-est-consternant_1737259.html
http://www.lemonde.fr/politique/article/2015/11/19/etat-d-urgence-une-marge-de-man-uvre-bien-trop-large-est-offerte-aux-autorites_4813627_823448.html
https://www.laquadrature.net/fr/etat-urgence-etat-policier
http://www.syndicat-magistrature.org/Vendredi-soir-des-attentats.html
http://www.liberation.fr/france/2015/11/19/henri-leclerc-restreindre-nos-libertes-est-une-victoire-pour-eux_1414810
http://www.liberation.fr/france/2015/11/19/les-policiers-armes_1414793
http://www.politis.fr/Etat-d-urgence-Valls-admet-ne-pas,33107.html
http://www.monde-diplomatique.fr/carnet/2015-11-16-Paris
Les 6 Justes:
Pouria Amirshahi http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/11/19/pourquoi-je-voterai-contre-la-prolongation-a-3-mois-d-un-etat-d-urgence-par-pouria-amirshahi_4813055_3232.html
Barbara Romagnan http://www.metronews.fr/info/attentats-de-paris-vote-contre-l-etat-d-urgence-une-decision-tres-difficile-a-prendre/moks!t8r9a6Wjct6Yc/
Gérard Sebaoun http://gerardsebaoun.fr/2015/11/pourquoi-jai-vote-contre-le-projet-de-loi-sur-la-prorogation-de-letat-durgence/
Isabelle Attard http://isabelleattard.fr/blog/2015/11/nul-par-la-guerre-ne-devient-grand/
Sergio Coronado http://sergiocoronado.fr/2015/11/nul-besoin-detat-durgence-pour-lutter-contre-les-terroristes/
Noël Mamère http://noelmamere.eelv.fr/prolongation-de-letat-durgence-noel-mamere-votera-contre/
http://www.maitre-eolas.fr/post/2015/04/06/Relisons-la-notice
http://www.franceculture.fr/2014-06-13-la-societe-de-surveillance-de-foucault
http://www.franceculture.fr/emission-la-grande-table-2eme-partie-comment-lutter-contre-le-terrorisme-avec-les-armes-de-la-democr
http://www.telerama.fr/idees/les-francais-doivent-se-battre-contre-le-projet-d-une-enieme-loi-contre-le-terrorisme-giorgio-agamben,121729.php
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