Plusieurs décisions de justice rendues ces derniers mois en France – dont une décision de rejet de la Cour de cassation en date du 20 mai 2015 – s'appuient sur le droit de la criminalité informatique pour limiter les formes innovantes d'expression politique qui se déploient sur Internet. Or, ce mouvement jurisprudentiel qui s'inscrit dans un contexte d'abaissement tendanciel des garanties entourant la liberté d'expression risque encore de s'aggraver compte tenu des récentes évolutions législatives dans le domaine de la cybercriminalité. Face à ces dérives, il est urgent de trouver des mécanismes permettant une conciliation équilibrée entre les différents intérêts en présence afin d'assurer une protection efficace de la liberté d'expression dans l'espace public numérique.
La Cour constitutionnelle belge a annulé hier la législation sur la conservation des données personnelles en vigueur. Elle s'est appuyée sur l'invalidation de la directive du même nom par la Cour de justice de l'Union européenne en avril 2014. En France, cependant, cette décision est restée sans effet. Pour l'instant.
Adoptée après les attentats de Madrid et de Londres en 2004 et 2005, la directive sur la conservation des données personnelles n’avait pas été bien appréciée par la Cour de justice de l’Union européenne. Et pour cause, les juges européens avaient considéré que le texte engendre « une ingérence d’une vaste ampleur et d’une gravité particulière dans les droits fondamentaux au respect de la vie privée et à la protection des données à caractère personnel sans que cette ingérence soit limitée au strict nécessaire ». Cette directive avait pour ambition d’harmoniser la collecte et la conservation des données dans toute l’Europe. Elle obligeait à cette fin FAI et opérateurs à conserver l’origine, la destination, l’heure et les équipements utilisés entre six mois et deux ans, au libre choix des États membres.
Ce 8 avril 2014, la CJUE a estimé dans son arrêt fondamental Digital Rights que « ces données, prises dans leur ensemble, sont susceptibles de permettre de tirer des conclusions très précises concernant la vie privée des personnes (…) telles que les habitudes de la vie quotidienne, les lieux de séjour permanents ou temporaires, les déplacements journaliers ou autres, les activités exercées, les relations sociales de ces personnes et les milieux sociaux fréquentés par celles-ci ». Or, si la lutte contre les infractions graves qu’entend mener ce texte est évidemment louable, ses rédacteurs avaient quelque peu oublié de fixer des bornes, obligeant une conservation indifférenciée, même chez les personnes où « il n’existe aucun indice de nature à laisser croire que leur comportement puisse avoir un lien, même indirect ou lointain, avec des infractions graves ». De même, ces dispositions visaient également « des personnes dont les communications sont soumises, selon les règles du droit national, au secret professionnel » (avocat, etc.), sans encadrer par ailleurs l’accès des autorités nationales, ni prévoir d’encadrement dans ces accès.
Au final, les juges invalidaient cette directive. Depuis lors, plusieurs juridictions nationales ont fait tomber les textes de loi la transposant désormais invalidée : en 2014, l'Irlande, l'Autriche, la Roumanie, la Slovaquie, la Slovénie, en 2015, les Pays-Bas, la Bulgarie. Hier, un nouveau pays s’ajoute à cette liste bien fournie : la Belgique.
La Quadrature du Net, French Data Network et la Fédération FDN publient un mémoire pour accompagner la saisine parlementaire au Conseil Constitutionnel contre la loi Renseignement. Les trois associations, opposées à la loi Renseignement depuis sa présentation en Conseil des Ministres le 19 mars, continuent leur mobilisation contre cette loi inique, et ce en dépit de son adoption à l'Assemblée nationale et au Sénat. Les citoyens sont invités à accompagner cette démarche en partageant et commentant ce mémoire d'ici jeudi matin 7 heures, pour y apporter leurs réflexions ou suggestions d'amélioration avant l'envoi au Conseil Constitutionnel. [...] Lire et commenter le mémoire contre la Loi Renseignement https://lqdn.co-ment.com/text//S2rnRkNZ68T/view/
Le débat sur la nouvelle loi sur le renseignement fait rage, et comme souvent en France, il est en retard sur le calendrier politique et intervient alors qu’un texte déjà bien ficelé est en cours d’examen par le parlement selon une procédure d’urgence de surcroît. Ce débat classique entre sécurité et liberté a un air de déjà vu – songeons aux tristement célèbres « lois scélérates » auxquelles faisait référence Edwy Plenel ce matin sur cette chaîne -, comme si rien n’avait changé depuis un siècle ? Ne sommes nous pas entrés dans une nouvelle époque qui n’exige certainement pas d’abandonner nos libertés mais d’en repenser les conditions d’exercice dans un nouveau contexte ? http://rf.proxycast.org/1017236494961614848/13952-16.04.2015-ITEMA_20745021-0.mp3
Autant le dire tout de suite, la réponse est non. Que ce soit pour un ordinateur, une tablette, un téléphone ou une boîte mail, personne n’est obligé de donner son mot de passe ou son code de déverrouillage à la police.
Mais il n’est pas forcément évident de comprendre pourquoi, ni de mesurer les conséquences d’un refus.
Le droit au très haut débit.