Les députés ont adopté le projet de loi sur la réforme pénale. L’occasion de refaire un point sur l’ensemble des mesures touchant de près ou de loin l’univers des nouvelles technologies, soit au stade judiciaire, soit au stade administratif (sans juge).
Le projet de loi sur la réforme pénale débutera son examen dans l’hémicycle aujourd’hui à 17h, jusqu’au 8 mars. À cette occasion, deux députés veulent s’attaquer au chiffrement. État des lieux de leur proposition et de la législation actuelle. [...] Deux millions, voire une interdiction visant opérateurs et FAI À droite, Éric Ciotti joue la surenchère : comme signalé par Le Figaro, il propose en matière de lutte contre le terrorisme une mesure similaire, cette fois sanctionnée de deux millions d’euros. Dans l'amendement que nous nous sommes procuré, on voit que son interdiction est très vaste : elle frapperait non seulement Apple, mais également tous « les fabricants d’outils de télécommunications, les opérateurs de télécommunications, les fournisseurs d’accès à Internet ou tout prestataire de services sur Internet », soit l'ensemble des acteurs des nouvelles technologies. Tout ce beau monde serait tenu de « communiquer l’ensemble des informations pertinentes pour la résolution » d'une enquête relative à des infractions terroristes. L’intermédiaire qui viendrait violer cette obligation pourrait se voir en outre interdire de commercialiser son produit ou sa prestation en France pour une durée d’un an.
ext INpact diffuse le projet de saisine du Conseil constitutionnel rédigé par une centaine de députés. Nous reviendrons plus en détails sur son contenu et spécialement les arguments soulevés.
À l'initiative de Laure de La Raudière et de Pierre Lellouche, deux députés Les Républicains, une centaine de parlementaires de l'Assemblée nationale ont signé ce projet de saisine du Conseil constitutionnel, lequel sera appelé à évoluer en fonction des arbitrages de dernières minutes. Nous diffusons intégralement ce document. Le projet de loi sur le Renseignement sera examiné cet après midi par les députés, après avoir été adopté hier par les sénateurs
https://cdn.nextinpact.com/medias/saisine-du-conseil-constitutionnel.pdf
Le 5 mai, l'Assemblée a adopté le projet de loi «Renseignement». 438 voix pour, 86 voix contre.
Ils sont déçus, mais prêts à recommencer quand il faudra (et ça ne manquera pas d’arriver). Pendant les débats sur la dernière loi antiterroriste, adoptée en commission mixte paritaire mardi, l’Assemblée nationale s’est transformée en théâtre de leur défaite.
Les députés avaient hier une opportunité de revenir sur l’article 20 de la loi de programmation militaire. Mais l’amendement défendu par les écologistes à l’occasion du projet de loi sur la géolocalisation fut sans grande surprise rejeté par l’Assemblée nationale et le gouvernement.
Si l’Assemblée accepte de rendre publics les noms des votants lors des scrutins publics, ce sera déjà une révolution. Cela ne pose aucune difficulté technique, puisque ces scrutins sont électroniques. Pour assurer la publicité de tous les scrutins, il suffit d’une décision du bureau de l’Assemblée.
Nous sommes aussi favorables à la suppression de toute possibilité de déléguer son vote (y compris pour les scrutins solennels), cela assurera une meilleure présence en séance. A défaut, il est indispensable de les encadrer pour en assurer la transparence. Claude Bartolone a promis de faire de l’Assemblée nationale «une maison de verre», il tient là une occasion en or de faire avancer la transparence. Mais il ne faut pas s’arrêter au milieu du chemin !
Sommée d’expliquer il y a quelques mois comment le gouvernement entendait résoudre les problèmes de qualité de connexion à Internet pointés notamment par une étude de l’UFC-Que Choisir, la ministre déléguée à l’Économie numérique Fleur Pellerin vient d’apporter sa réponse à une cinquantaine de députés.
En fin d’année dernière, l’UFC-Que Choisir tirait le signal d’alarme. « Il y a un bel et bien un problème de qualité des connexions internet. Et cela ne peut s’expliquer uniquement par des désaccords entre les opérateurs et les prestataires de services internet sur l’interconnexion » lançait l’association de consommateurs, dressant au passage un constat accablant à l’encontre de tous les opérateurs, Free en tête. En filigrane, l’UFC-Que Choisir dénonçait la guerre financière à laquelle se livrent FAI, services Internet et intermédiaires (transit), et qui se cache derrière ces difficultés d'accès aux gros sites ou à certains protocoles. Elle demandait surtout aux pouvoirs publics de se saisir de la question de l’interconnexion.
Un écho à ces demandes se fit entendre à l’Assemblée nationale, puisqu’une cinquantaine de députés de l’opposition comme de la majorité ont depuis questionné la ministre déléguée à l’Économie numérique à ce sujet. Reprenant les conclusions de l’UFC-Que Choisir dans leurs grandes lignes, ces élus tambourinaient devant la porte de Fleur Pellerin que « ces problèmes d'interconnexion pénalisent les consommateurs qui ne bénéficient dès lors plus de la totalité des services payés, sans même en avoir été informés au préalable ». Ils demandaient ainsi à la locataire de Bercy de se saisir du problème et d’indiquer quelles propositions le gouvernement envisageait de prendre afin de mettre fin aux problèmes d'interconnexion entre opérateurs. « Si des règles claires ne sont pas rapidement établies, les difficultés d'accès entre les différents acteurs vont se multiplier, mettant en danger le principe d'un internet libre et ouvert à tous ».
La ministre met en avant les dispositifs existants
Après plus de trois mois et demi d’attente pour certains, la ministre vient d’apporter sa réponse. Fleur Pellerin affirme aujourd’hui qu’Internet joue « un rôle fondamental dans l'exercice effectif de la liberté d'expression et de communication », et que « l’accès à l'information et à l'ensemble des contenus disponibles sur internet sans discrimination est donc essentiel » à ses yeux. D’après la locataire de Bercy, « aucun acteur, qu'il s'agisse de fournisseurs d'accès, de terminaux, de contenus, d'hébergement, d'applications ou moteurs de recherche, n'est ainsi légitime à faire obstacle ou à restreindre l'accès aux informations disponibles sur l'internet ».
Sauf que malgré ces belles paroles, le constat de l’UFC-Que Choisir reste entier. La ministre poursuit ainsi en expliquant qu’« outre le droit commun de la concurrence, certains dispositifs existent déjà pour traiter les problèmes relatifs à l'acheminement du trafic et garantir la qualité de l'accès à l'internet ».
L’ARCEP va mettre en place un dispositif de mesure de la qualité du service
Elle brandit tout d’abord les pouvoirs d'enquête administrative dont dispose aujourd’hui l’ARCEP, le régulateur des télécoms, et qui permettent à l’institution « de recueillir des informations et documents auprès des personnes fournissant des services de communication au public en ligne concernant les conditions techniques et tarifaires d'acheminement du trafic appliquées à leur service ». C’est d’ailleurs sur cette base que l’autorité administrative a ouvert l’année dernière une enquête sur les lenteurs de YouTube chez Free.
Fleur Pellerin met également en avant la mise en place par l’ARCEP d’une « collecte régulière auprès des fournisseurs d'accès à internet et des fournisseurs de services de communication au public en ligne concernant les informations relatives à leurs conditions techniques et tarifaires d'interconnexion et d'acheminement de données afin de disposer d'une meilleure visibilité de l'évolution de ce marché ».
Ensuite, la locataire de Bercy fait valoir que « l'ARCEP a été chargée de suivre la qualité de l'accès à l'internet ». Selon Fleur Pellerin, l’institution devrait d’ailleurs « prochainement adopter une décision introduisant un dispositif de mesure de la qualité du service ». Les résultats de cet indicateur devront être publiés chaque trimestre. Il apparaît en outre que « l’ARCEP pourra également fixer des exigences minimales de qualité de service aux opérateurs ». En cas de non-respect de ces exigences, le contrevenant « pourra faire l'objet d'une sanction notamment financière ».
Les conclusions d’un groupe de travail attendues pour « les tous prochains mois »
La ministre ajoute que « les obligations en matière de transparence et d'information des consommateurs prévues par le code de la consommation ont été renforcées ». Un groupe de travail a selon elle été mis en place « afin d'assurer la mise en oeuvre de ces dispositions et permettre aux utilisateurs de disposer d'informations claires et comparables sur les services réellement accessibles via l'internet et la qualité de ces derniers ». Composée d’opérateurs et de représentants de consommateurs, cette instance devrait remettre ses conclusions « dans les tous prochains mois ».
Fleur Pellerin fait enfin référence au récent avis du Conseil national du numérique sur la neutralité du Net, lequel a invité le gouvernement à inscrire ce principe dans la loi. « Des dispositions législatives devront en conséquence être adoptées » conclut la ministre. Une façon d’entr'ouvrir une porte sans trop se mouiller.
Les opérateurs français ont-ils reçu consigne du gouvernement d’utiliser d’une manière ou d’une autre le Deep Packet Inspection ? C’est en substance la question que vient d’adresser Isabelle Attard à la garde des Sceaux.
Des tests menés en Allemagne par les ayants droit français
Les ayants droit ont depuis longtemps dans leur carton un projet une solution de filtrage par deep packet inspection. Cela nous avait été dévoilé par Marc Guez, président de la SCPP, qui réunit les majors de la musique. « C’est un robot qui vérifie : est-ce qu’il y a un fichier protégé dedans ou pas, si oui, le fichier protégé ne suit pas » expliquait-il en septembre 2010. Testé en Allemagne, ce filtrage, programmé à l’époque dans l’écosystème Hadopi, avait été évoqué à Bruxelles. « On l’a évoqué devant la Commission européenne de manière non positive avec les FAI » admettait-il.
Plus récemment, devant la mission Lescure, la SCPP a revu à la baisse ses ambitions suite à une jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne (affaire Sabam). « On dit à la Mission Lescure qu’en dehors de la réponse graduée, si jamais elle devait être abandonnée, le filtrage fait aussi partie des mesures qui fonctionnent » nous a relaté toujours Marc Guez. « On sait que le filtrage par DPI a été rejeté par la CJUE qui l’estime trop intrusif, mais le filtrage par DNS, lui, ne l’est pas. »
Le deep packet inspection au-delà de nos frontières
En attendant la réponse gouvernementale, Isabelle Attard considère sans mal que « ces technologies [de DPI] pouvant servir à censurer ou à mettre sous surveillance des citoyens, hors de toute procédure judiciaire, il serait particulièrement dangereux pour notre démocratie que des opérateurs privés les utilisent sur les réseaux français. »
La sensibilité du DPI varie toutefois selon le côté de la frontière. Questionné en mars 2013, Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères, a considéré – comme ses prédécesseurs - que l’exportation des outils de DPI ne pose aucune difficulté particulière puisqu’il s’agit de solutions développées sur la base de produits « grand public ». Aucune autorisation n’est nécessaire pour leur vente, même dans des pays à la démocratie chancelante : « Ces matériels de communication, qui sont développés sur la base de produits du marché grand public et qui n'ont pas d'usage militaire, n'ont a priori pas vocation à faire partie de l'une des catégories d'équipements soumis à autorisation d'exportation. »
Une belle cacophonie puisque quelques jours avant, le premier ministre exprimait son souhait d’ « inclure les technologies de surveillance et de contrôle de l’internet dans la liste des biens à double usage dont l’exportation est soumise à autorisation »...